Encore un effort pour intégrer en France les critères ESG dans la politique de rémunération de tous les établissements de crédit et entreprises d’investissement.
1°) Un non alignement de l’ACPR sur les orientations de l’ABE en matière de rémunération saine et de prise en compte des critères ESG
L’ACPR a publié 2 notices de conformité aux orientations de l’ABE relatives aux politiques de rémunération saines.
L’une le 7 décembre 2021 relative aux orientations de l’ABE du 2 juillet 2021 concernant les établissements de crédit, les sociétés de financement, et les entreprises d’investissement de catégorie 1 bis. Ces orientations viennent compléter, en matière de politiques de rémunérations, les dispositions de la Directive CRD IV (UE) 2013/36 transposée par l’ordonnance du 21 février 2014 dans le code monétaire et financier notamment aux articles L. 511-71 à L511-88, et au chapitre 8 du titre 4 de l’arrêté du 3 novembre 2014. Ces orientations entrent en vigueur au 31 décembre 2021, pour les années de performance 2022 et suivantes.
De façon générale, l’ACPR a indiqué ne pas se conformer à certaines orientations en raison de leur non-conformité à la transposition nationale des exigences de la CRD concernant les rémunérations. Elle a détaillé de la façon suivante son argumentation : « Les orientations comprennent une cartographie des exigences en matière de rémunération pour l’ensemble du personnel et pour le personnel identifié uniquement (annexe 1). La portée de plusieurs exigences des articles 92 et 94 de la CRD (par exemple, politique de rémunération conforme à la stratégie de l’entreprise, et qui incorpore des mesures pour éviter les conflits d’intérêts) a été étendue à l’ensemble du personnel par les orientations, même si la lecture des articles susmentionnés de la CRD indique que ces articles ne s’appliquent qu’au personnel identifié. La structure et la portée des articles 92 et 94 de la CRD ont été fidèlement transposées en droit français dans les articles L.511-71 à L.511-88 du Code Monétaire et Financier. Pour ces raisons, l’ACPR n’est pas en mesure de se conformer pleinement aux paragraphes 14 à 16 ; 18 ; 19 et 21 des orientations. »
L’autre notice de conformité publiée le 21 avril 2022, est relative aux orientations de l’ABE du 22 novembre 2021 concernant les entreprises d’investissement de catégorie 2 (EI2). Ces orientations viennent compléter, en matière de politiques de rémunérations, les dispositions de la Directive IFD (UE) 2019/2034 sur la surveillance prudentielle des entreprises d’investissements, transposée par l’ordonnance du 23 juin 2021 dans le code monétaire et financier notamment aux articles L533-30 à L533-30-17, et au chapitre 8 du titre 4 de l’arrêté du 3 novembre 2014. Ces Orientations entrent en vigueur au 30 avril 2022, pour les années de performance 2022 et suivantes. Au 31 mai 2022, l’ACPR n’avait pas encore notifié à l’ABE les raisons pour lesquelles elle n’entend pas se conformer à certaines de ces orientations.
Parmi les orientations précédentes de l’ABE auxquelles l’ACPR n’entend pas se conformer, figure l’orientation numéro 16 pour les établissements :
« 16. La politique de rémunération de l’établissement pour l’ensemble du personnel devrait être cohérente avec les objectifs de la stratégie économique et la stratégie en matière de risque de l’établissement, y compris les objectifs liés aux risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG7), … »
Et l’orientation numéro 16 pour les EI2 :
« 16. La politique de rémunération de l’entreprise d’investissement pour l’ensemble du personnel devrait être conforme à ses objectifs en matière de stratégie économique et de risques, y compris aux objectifs liés aux risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG4), … »
Ainsi, sous le motif que les articles 92 et 94 de la CRD ne s’appliquent qu’au personnel identifié, l’ACPR a rejeté l’orientation 16 précédente, et n’a pas rendu obligatoire la prise en compte des objectifs liés aux risques ESG dans la politique de rémunération.
4 et 7 Voir également le règlement (UE) 2019/2088 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers
2°) Une prise en compte obligatoire seulement pour les établissements soumis à SFDR
Le règlement SFDR règlement (UE) 2019/2088 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers exige pourtant l’intégration des risques de durabilité dans la politique de rémunération, mais uniquement pour les établissements de crédit fournissant des services de gestion de portefeuille ou des conseils en investissement.
Les établissements français exerçant d’autres activités que celles de services de gestion de portefeuille ou des conseils en investissement, se trouvent ainsi en 2022 exemptés de cette obligation.
3°) Une future obligation pour les grands établissements dans le cadre du pilier 3
Dans les six premiers mois de 2023, les grands établissements devront néanmoins fournir dans le cadre du pilier 3 (conformément à l’article 449 bis du CRR), des informations prudentielles sur les risques ESG (projet final de mise en œuvre de normes techniques (ITS) de l’EBA publié le 24 janvier 2022). Ce projet a été soumis à la Commission Européenne. En matière de rémunération, il prévoit au paragraphe 72 dans le cadre du risque sur la gouvernance une obligation de publier des informations sur l’alignement de la politique de rémunération avec les risques ESG.
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